ECOLOGISTES UN JOUR, PRODUCTIVISTES TOUJOURS!

En 1977, avant les élections municipales, j'avais rencontré pour l'hebdomadaire écologiste "La Gueule Ouverte" des représentants des partis politiques, unanimes: "Ecologie, mon beau combat". Certains prônaient des mesures qui, si elles avaient été prises, auraient permis de réduire considérablement les dégâts écologiques, au moins en France. Mais ils ne l'ont pas fait, et c'est pourquoi relire leurs déclarations enflammées est riche d'enseignements ... 45 ans plus tard! Quelques échantillons:

Philippe Saint Marc (Centre et Démocratie Sociale): La croissance devrait prendre en compte, pour un produit donné, le bien-être et les nuisances qu'il apporte, et en fonction de ce calcul déterminer quels sont les produits vraiment utiles. En somme, remplacer l'indice de productivité par un indice de satisfaction des besoins. Des vrais besoins : verdure, air, eau pure, sécurité au travail et sur la route, et réduction de la taille des entreprises. Pénaliser toute atteinte à la qualité de la vie, toute destruction de l'environnement. Actuellement, les amendes sont si dérisoires qu'il est plus avantageux pour un industriel de détruire, quitte à être condamné ensuite. Développer les transports en commun, réduire la vitesse automobile, favoriser les énergies douces et les énergies traditionnelles permettraient de réduire le programme nucléaire et de supprimer des centrales dangereuses comme celle de Nogent-sur-Seine. Cette centrale, trop près de Paris, évacuera ses déchets et ses calories dans la Seine qui n’a pas assez de débit pour le supporter. Quelle hérésie !

Le CDS n'a aucune hostilité envers un socialisme humaniste. J’ai de très bons amis socialistes. Mais je ne crois pas que le PS et encore moins le PC changent notre vie. François Mitterrand est un homme très sensible à la nature, mais il n’en fait pas un problème politique essentiel. A l'inverse, Valéry Giscard d’Estaing ne raffole pas de la nature, mais pense que c'est un problème politique majeur. Politiquement, il est donc plus efficace de se rallier à la majorité.
 

Jean-Pierre Chevènement (PS, branche CERES): Nous ne sommes pas contre l’énergie nucléaire mais nous voulons que les investissements nécessaires soient réalisés en matière de sécurité, d'élimination des nuisances et de stockage des déchets. Quoi qu'il en soit, je pense que l'énergie nucléaire est un passage obligé pour les vingt-cinq ans à venir, mais qu'au delà on préférera les énergies solaire, éolienne et hydraulique. (autrement dit, plus de nucléaire à partir de 2002, on en est loin!). Nous devons éviter aussi de tomber sous la coupe du lobby nucléaire, j'entends de toutes les entreprises qui ont intérêt au choix nucléaire. C'est la quadrature du cercle ! Il est évident que les préoccupations écologiques touchent les ouvriers de chez Peugeot, qui rêvent tous de poules, de lapins, d’air pur, de silence...

- Françoise Danam : Arrêtez ! Arrêtez ! L'écologie ne se limite pas aux fleurs et aux petits oiseaux. Elle a d'abord pour but de permettre aux gens de reprendre leur destin en mains...

- J-P Ch. : Comme nous, qui proposons l'autogestion. Mais les ouvriers de Peugeot n’ont pas spontanément l'idée de l'autogestion. La stratégie de la gauche au pouvoir se veut la rupture avec la logique capitaliste et impérialiste, notamment par la transformation de nos rapports avec le tiers-monde. Elle se veut aussi rupture avec l'organisation actuelle du travail et la division des gens en catégories. De ces deux ruptures découlent forcément la remise en cause de la notion de profit, et l'apparition de la notion d'utilité et d'inutilité. La bourgeoisie n'a qu'un souhait : conserver les équilibres actuels, le statu quo, et garder le pouvoir. Nous ne nous attaquerons pas impunément à ses privilèges. Il n'y a aucune garantie qu'on ne finisse pas dans un stade, à partir du moment où on s'attaque à des privilèges. Le seul moyen pour l'éviter est de créer un rapport de forces tel qu'il dissuade ceux qui seraient tentés de le faire de recourir au fascisme. Cela implique qu'on définisse dès aujourd'hui une politique qui vise à la fois à transformer l'institution militaire et à reconsidérer les orientations de la Défense.

Jean-Marie Poirier (Républicains Indépendants, Giscardien): l'écologie est une arme sur l'homme de la rue. On est sûr de gagner des voix en parlant d'espaces verts et de dimension « à l'échelle humaine ». Mais la gauche non plus ne se préoccupait pas d'écologie avant ces dernières années.

F. Danam. La politique gouvernementale contrarie vos princi­pes avec une remarquable régularité. Voyez l'urbanisme : la Défense...
- ... Une prodigieuse connerie, je vous autorise à l'écrire. A partir du moment où un projet a une certaine envergure, on a forcément une vue empirique de ses conséquences, aucune certitude scientifique.

Si les écologistes s'occupent de tout, ils sombre­ront dans l’opportunisme politique. Les candidats verts doivent être des candidats pédagogiques, pour
faire connaître les problèmes d'environnement. S'ils vont au-delà, ils font de
l'humanisme politique.
F. Danam. Au 2e tour, entre un candidat de la gauche et un candidat écologiste, pour lequel voteriez-vous ?
- En tant que RI, je serais obligatoire­ment pour le candidat écologiste. A titre per­sonnel, je préférerais le candidat de la gauche, qui est capable de gérer. Les écologistes n'en n'ont au fond ni l'envie ni les capacités. Ils sont trop angéli­ques. Le pouvoir angélique est difficile.

En dehors de l'envie de garder le pouvoir, quel est pour les RI l'enjeu des élections ?
- Votre question est un amalgame de perversité et de subversion. Oui, nous
garderons le Pouvoir. Puis il sera temps de reclasser les forces politiques
d'ici 78.
- C'est-à-dire ?
- On ne peut garder la France coupée en deux.
- Voulez-vous dire un rapprochement avec les socialistes ?
- On peut le comprendre ainsi. »

Il y eut aussi rencontre avec un représentant du RPR (Chiraquien) Antoine de Gaudemar (maoïste) et Michel Mousel (défunt PSU) mais point trop n'en faut, un billet trop long décourage!