Ce qui rend l'humain humain, c'est la culture. J'ai déjà écrit icique si l'homme préhistorique, après une journée épuisante à traquer le mammouth, avait éprouvé le besoin de dessiner sur les grottes sans espoir d'avoir un public et des acheteurs pour ses œuvres, c'est que la culture est plus qu'importante : essentielle. L'essence même de la civilisation. Que retient-on d'un pays? Les Pyramides d'Egypte, la muraille de Chine, les églises de tous styles, la Bible, Léonard de Vinci, Victor Hugo, Bach, Mozart ou Miles Davis, les thermes romains, les temples Incas ou Hindous, les peintures aborigènes, les sculptures du Zimbabwe, les masques Vaudous, toutes les musiques... Si la France demeure la première destination touristique au monde, c'est certes parce que ses paysages sont magnifiques et qu'on y mange bien- la cuisine étant en elle-même une culture- mais aussi parce qu'on y trouve, sur un territoire pas très grand, un concentré unique d’œuvres d'art de toutes les époques. Si les Américains et les Australiens découvrent sur le tard les Indiens et les Aborigènes qu'ils ont massacrés et appellent désormais « natives» pour signifier qu'ils sont à l'origine de leur pays, c'est bien parce qu'il est important de savoir d'où l'on vient pour savoir où l'on va.
Une civilisation qui néglige la culture cesse rapidement d'être civilisée. J'ai connu un homme avec qui les discussions s’achevaient souvent par une explosion de violence de sa part quand nous n'étions pas d'accord. Un jour où je lui en fis la remarque, il répondit : « Oui, mais toi tu maîtrises les mots, moi je n'ai pas fait assez d'études. Alors quand je ne trouve pas les mots, ça me donne envie de crier ou frapper. » (il n'avait que crié, sachant qu'un geste de trop m'aurait fait fuir à jamais.). Les mots, comme antidote à la violence...
Oui, la culture est un des meilleurs vecteurs de cohésion sociale et de construction de l'identité de chacun. (2012)
J'ai un ami agriculteur et documentariste. Un jour qu’il racontait ce qu’il faisait à un copain, celui-ci éructa : « Tu es intermittent du spectacle ? Système d’assistés, de nantis. Foutez rien et on vous paie… » Il se trouve que l’éructeur était militaire. Frédéric lui répondit calmement : « Tu es payé toute l’année, depuis des années, sans que tu fasses la guerre, alors que le métier du militaire est de faire la guerre. En somme, tu es un intermittent de la guerre. Permets-moi de me réjouir que tu sois intermittent ! Moi, j’ai choisi d’être intermittent de la culture, tout aussi nécessaire à l’humain que la guerre, mais hélas précaire. Et dis toi qu’avec 1 ou 2% du budget de la Défense, on couvrirait largement toutes les sommes versées aux intermittents du spectacle. » (2010)
Et pour finir, relisez « La vie très privée de Guy Kaddict », c'est pour l'instant de la science-fiction, mais ça deviendra vite VOTRE réalité si vous continuez à ne rien comprendre au conflit des intermittents, des fonctionnaires et de bien d'autres catégories sociales dont on ne découvre l'indispensabilité (néologisme, je sais) que lorsqu'elles disparaissent.