"Ce qui vient de se passer (le référendum) n'a aucune conséquence, c'est nul et non avenu [...] La seule élection qui vaudra, c'est celle du 25 mai, le reste n'est qu'un faux semblant". Qu'il est sidérant ce Hollande ! Des milliers de personnes ont participé à cette consultation, et qu'il soit ou non d'accord avec le résultat, ce résultat est là. Affirmer que le scrutin est nul parce qu'il ne lui plaît pas, n'est-ce pas une ingérence dans les affaires intérieures d'un pays étranger et un déni de démocratie ?
Mais j'y pense : n'est-ce pas en France que le peuple, au cours d'un scrutin tout ce qu'il y a d'officiel et d'organisé a voté en 2005 à 55 % contre le projet de Conctitution européenne et qu'il n'en a été tenu aucun compte ? (précision: voter contre n'était pas « être contre l'Europe », mais contre la ligne économique ultralibérable qui transpirait à chaque page du Traité). Plus tard, quand des députés ne votaient pas selon la ligne attendue par l'exécutif, n'est-ce pas en France qu'on les a fait revoter pour obtenir la réponse souhaitée ? Et le président de cette France là ose donner des leçons de démocratie à l'étranger ?
N'est-ce pas les économistes de 2008 qui affirmaient doctement « la crise est derrière nous » « il n'y a aucun risque que les banques soient touchées l'une après l'autre », "le capitalisme, il n'y a que ça qui marche" qu'on retrouve sur les plateaux TV en 2014, toujours pédants et sûrs d'eux alors qu'ils ont eu faux sur toute la ligne tandis que ceux qui avaient vu juste et mis en garde contre « l'argent fou » sont peu ou pas invités ?
N'est-ce pas le Ministère de la Culture, préposé au rayonnement de la culture française, qui a supprimé en 2013 toute subvention au « Monde Diplomatique », magazine français le plus lu sur la planète, tandis qu'il octroie de l'argent public (le mien, le vôtre) à Télé 7 jours, Gala ou Closer et surtout au Figaro de Dassault (premier journal subventionné par le Ministère de la Culture, 16 millions en 2013) qui engrange par ailleurs des millions de recettes de pub via ses magazines (Fig-mag, madame Figaro), et fustige en permanence les « assistés » qui vivotent du chômage ou avec le RSA.
Quant au fils à papa Pierre Gattaz, président du MEDEF de père en fils (son père Yvon présidait aux destinées du Centre National du Patronat Français, ancêtre du MEDEF, dans les années 80) il vient de s'octroyer 25 % d'augmentation de salaire tout en proposant d'instituer des contrats de travail en dessous du SMIC. L'idée d'un salaire minimum lui semble insupportable, mais celle d'un salaire maximum acceptable ne l'effleure même pas.
Quand se taieront enfin les éditorialistes perroquets qui répètent en boucle: « Croissance, il faut de la croissance, la croissance n'est pas au rendezz-vous"? Qu'ils aillent vivre en Afghanistan ou en Sierra Léone, ils y trouveront des taux de croissance de 12,5 à 15 % (chiffres 2012.) Ça veut dire quoi d'ailleurs la croissance ? En Libye, qui du temps de Khadafi avait un taux de croissance oscillant entre 2 et 4,5 % (à la louche), il y a eu en 2012 un taux de croissance de … 104,5 %, venant après une chute de croissance en 2011 de … - 62,1 %. Ça sent bigrement les chantiers de reconstruction sur lesquels, comme des charognards, se sont précipitées les entreprises de BTP du monde entier !
La croissance n'est pas un bien en soi, mais la photo d'une situation économique conjoncturelle qui ne préjuge en rien du bonheur des habitants du pays, au contraire. Les pays développés ont naturellement peu de croissance parce qu'ils débordent déjà de biens de consommation... qu'ils n'arrivent d'ailleurs plus à vendre, et c'est la crise !
Comme le remarque sagement le site « statistiques mondiales » le taux de croissance ne mesure que la croissance du revenu humain et non la valeur du patrimoine de l'humanité. Si cette croissance s'obtient en puisant dans l'actif de l’humanité ( ressources et énergies non renouvelables, NDLR) celui-ci se dévalorise et le bilan comptable réel devient négatif. Ce pourrait être le cas depuis les années 1970/80. En d'autres termes l'obsession de la croissance enrichit quelques individus mais appauvrit le monde.
Qu'on cesse de harceler les gens avec la dette. Si, comme dans d'autres pays, une banque centrale avait prêté à taux bas aux Etats européens au lieu, comme la Banque centrale européenne, de prêter à 1 % aux banques privées des milliards que celles-ci ont prêté ensuite à des taux pouvant atteindre 7 % pour des pays comme la Grèce, aucun pays d'Europe ne serait accablé par sa dette. Par ailleurs si la comptabilité publique faisait comme les comptabilités d'entreprises- amortissement de la dette sur plusieurs années et prise en compte des actifs dans le bilan- on découvrirait qu'un pays qui s'est endetté pour éduquer les jeunes, investir dans la recherche, garantir une bonne santé aux habitants et entretenir son patrimoine est en fait un pays riche en patrimoine et ressources humaines de qualité, alors que le même pays s'appauvrit quand il emprunte pour pouvoir consentir des réductions de charges à des entreprises qui les utilisent à 65, voire 80 % pour rémunérer leurs actionnaires au lieu de les investir dans la recherche et leur activité d'économie réelle.
Le surprenant, le sidérant, le désespérant, c'est que l'analyse de la situation est faite depuis longtemps, de façon très détaillée, dans moult livres, articles et excellents documentaires sur l'argent fou, la faillite des banques, l'évasion fiscale, les liens douteux entre finance et politique et même les projets alternatifs qui marchent. Nul ne pourra dire comme en 45 : « Je ne savais pas ». Mais alors pourquoi rien ne bouge-t-il alors que cette situation mériterait... n'ayons pas peur des mots, une Révolution ?
J'ai posé la question autour de moi, avec souvent pour réponse : « Les gens pensent que ce système va dans le mur, mais ne savent pas quoi mettre d'autre à la place ? » La propagande selon laquelle le communisme est une horreur, l'écologie est utopique, les alternatifs des marginaux, les pays d'Amérique Latine pauvres et violents, l'Afrique toujours mal partie et jamais arrivée fait que l'idée même de changer angoisse ceux qui entendent à longueur de journée ces litanies dépressives.
La crise, c'est peut-être cela : préférer un monde fini, usé, qui va dans le mur mais on connaît le mur, plutôt qu'oser explorer des horizons nouveaux, où le regard se perd avec volupté.
Ah oui, le titre de ce billet : je suis la Vénus de Milo, car face à cela... les bras m'en tombent.