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5 juin 2012 2 05 /06 /juin /2012 18:47

J’ai commencé le journalisme sous d’agités auspices : crise économique (chocs pétrolier de 1973 et 1978) violences urbaines et internationales (guerre du Vietnam, coups d’Etat en Amérique Latine financés par la C.I.A), famines au Biafra, au Bengladesh et ailleurs,  mais avec un fourmillement d’actions positives : débuts de l’humanitaire organisé, féminisme, prise de conscience écologiste relayée par « la Gueule Ouverte » et un supplément au Nouvel Obs qui s’appelait « le Sauvage » ( eh oui ! Il fut un temps où les socialistes s’intéressaient à l’écologie en dehors des périodes électorales !)

rebelle_fran_oise_1973.jpgArrivant de province, je découvrais ce métier merveilleux dont j’ai toujours pensé « quelle chance d’être payée pour me cultiver… »  A l’époque, le tarif du feuillet était de 100 francs, le SMIC à 1200francs environ. Transposé aujourd’hui, ca ferait un feuillet à environ 90 €. De quoi faire rêver les rédacteurs Internet d’aujourd’hui à qui on propose de pisser de la copie pour 15 € le feuillet… En contrepartie, on bossait comme des malades les soirs de bouclage. Qui se terminaient par un tala, pot joyeux entre journalistes, typos et ouvriers du livre. Tala, Kézaco ? On boit TALA santé d’Untel ou du journal !

nucl_aire.jpgA ELLE,  dirigé par une grande dame de la presse nommée Daisy de Galard, les journalistes proposaient des sujets, elle demandait : « C’est intéressant ? –J’ai l’impression. – Allez voir.» Il pouvait s’agir de la réforme du divorce, d’un film en tournage, de la loi sur l’avortement, du nucléaire, des problèmes des viticulteurs, de l’interview d’un braqueur repenti, des traitements du cancer du sein, du succès inquiétant de la secte Moon…. J’y ai fait tout cela… Au retour de reportage, Daisy demandait si l’enquête valait un papier, et si oui, de quelle longueur. Sans aucune limite liée au coût du papier, au frais de reportage ou aux diktats des annonceurs (genre : « ah non, rien sur le nucléaire, EDF nous achète une page de pub » comme ce fut le cas dix ou quinze ans plus tard) Le seul impératif était d’apporter de l’info nouvelle et intéressante. Et ça marchait : ELLE vendait alors 700 000 ex par semaine.

GOSSIP3.jpgSeul bémol : provinciale, je ne possédais pas les codes de langage de la capitale, tout en superlatifs. A Paris, on n’est pas surpris, on hallucine. Un objet n’est pas démodé, mais kitchissime,  un autre forcément branchouille, et telle robe « sublimissime ». C’est fort, quand elle n’est pas même sublime. Tout est superlatif aux parisiens aisés qu’on surnomme bo-bos, pour qui hors Paris point de salut, qui ne rient pas mais HUR-lent de rire et ont l’impression de partir à l’aventure dès qu’ils s’aventurent au-delà du périphérique ou dans un milieu différent du leur. Comme cette journaliste chroniqueuse qui refusa tout net d’aller faire une interview : « Je ne parle pas à des gens que je ne connais pas. » Exemple extrême… Quoique j’ai rencontré un journaliste d’un news magazine venu faire une enquête sur les difficultés des vins de Bordeaux. Il  arriva le soir après la visite des chais et des propriétaires, assista au somptueux dîner merveilleusement arrosé et repartit le lendemain matin en me disant « Je me suis fait mon idée… De toute façon,  j’ai pratiquement écrit mon papier dans l’avion en venant. »  C’était contraire à l’éthique mais pas forcément à la qualité. C’est ainsi qu’un article sur la prostitution des mères de famille dans les grands ensembles avait été unanimement remarqué et loué… alors que le journaliste n’avait pas fait la moindre enquête. Un jour, passant en voiture avec un ami devant une cité en chantier hérissée de grues, il avait murmuré : « Qu’est-ce que les femmes doivent se faire chier ici ! – Penses-tu, avait suggéré son pote, leurs maris sont au boulot… Je suis sûr qu’elles fricotent avec les beaux ouvriers immigrés. » Il avait vu juste, puisque dans le courrier des lecteurs, quelques femmes confirmèrent qu’elles trompaient l’ennui en trompant leur mari, ce qui leur permettait d’arrondir la cagnotte permettant d’acheter des babioles sans en parler à l’époux. Comme quoi l’intuition peut tenir lieu de talent…

eau.jpgDepuis, chaque fois que je lis le récit d’explorateur d’un journaliste parisien commençant sur un ton inspiré par : « Il pleut sur (Hagondange, Charleville-Mézières, Trebeurden, n’importe où hors  Paris), les rues noires sont désertes, quelques adolescents  désœuvrés sirotent une pinte dans l’unique café de la ville ouvert passé 21h… » je ne peux m’empêcher d’imaginer que le journaleux a rédigé son papier tranquillou chez lui, vu qu’en province il est vite perdu si  le réseau ne passe pas, qu’Internet a une connexion lente et qu’il n’y a aucun ami Facebook. 

Et c’est pourquoi, lasse de lire et d’entendre de doctes analystes en salon affirmer « les Grecs sont comme ci, les Grecs sont comme ça » je vais dès demain aller me faire voir chez les Grecs. Ou plutôt aller les voir, parler avec eux, contempler la mer Egée, et me réjouir de cette lumière unique du ciel Héllène qu’aucune crise financière ne pourra jamais ternir.

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serifos moulin

 


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24 mai 2012 4 24 /05 /mai /2012 00:48

Le 26 mai, je suis invitée. Je manquerai donc un de mes plaisirs inavouables, une régression comme je les aime,  du style regarder  au lit une émission ringarde avec une bière et des chips, la totale.  Je veux parler de la finale du Concours Eurovision de la chanson. Ah ! Voir défiler d’improbables artistes, célébrités d’un soir… Qui se souvient de Jessy Matador, Virginie Pouchain, Marie Line, Fanny, Roger Bens, Jean Gabilou ou Jean-Paul Mauric qui eurent l’honneur de représenter la France à ce concours, après une impitoyable sélection ?

Ah ! Entendre les présentateurs scander avec un fort accent : « Italie, un point. Italy, one point » « Azerbaïdjan, trois points, Azerbaïdjan, three points. » Ca dure des plombes,  le suspense est total, les costumes à paillettes, les chansons entre folklore et sirop, personne ne comprend les critères, peut-être  politiques, qui président aux votes des jurés puisque depuis quelques années les pays de l’Est ont la part belle dans le palmarès, mais on ressent à regarder cela le même plaisir que celui qu’on a à enfiler un vieux pull datant de ses quatorze ans : un sentiment d’intemporalité, de sécurité absolue loin des agitations du monde moderne. Et puis on peut se lever pour aller faire pipi ou se confectionner un solide en-cas, on ne risque pas de manquer des choses inoubliables.

Le concours Eurovision de la Chanson, c’est une institution qui dure depuis  le milieu des années 50, imperturbablement.  J’étais trop jeune pour savoir que la France était leader de ce concours à cette époque. Gagnante en 1958 avec « Dors mon amour » chanté par André Claveau, 1960 avec Tom Pillibi chanté par Jacqueline Boyer et 1962 avec « Un premier amour » chanté par Isabelle Aubret. Période de gloire effacée par des années de défaite successives… La dernière victoire date de 1977, avec Marie Myriam dont peu d’entre vous se souviennent. Le champion absolu est l'Irlande avec 7 victoires depuis 1965...  

 gall-1965.jpgTrêve de persiflage, l’Eurovision c’est doux comme une madeleine proustienne, avec des fragments de chansons qui restent en mémoire. En 1964, Non ho l’eta, où Gigliola Cinquetti chantant non ho l’eta  per amarti, non ho l’eta per uscire sola con te (je n’ai pas l’âge de t’aimer, je n’ai pas l’âge de sortir seule avec toi)  a fait rêver des milliers d’ados qui avaient justement le même problème : être amoureuses et ne pas avoir le droit de sortir avec leur flirt.  Ca ramène au temps de « Diabolo menthe », le moyen-âge comme diraient mes filles… En 1965, ce ne fut pas la France mais le Luxembourg qui triompha avec France Gall et sa « Poupée de cire, poupée de son » (chanson de Gainsbourg, tout de même !) que je suis encore capable de brailler par cœur…  Tout comme d’ailleurs je connais encore le refrain de la chanson représentant la France : « N’avoue jamais » de Guy Mardel, mais ne me demandez pas les couplets …

dion-1988.jpgFrance Gall est une des rares gagnantes de l’Eurovision, avec Céline Dion, à avoir fait une belle carrière. En revanche, plusieurs candidats malheureux à ce concours ont connu le succès après.  Alain Barrière, le crooner préféré des  mères de familles et des très jeunes filles de 1963 y chanta « Elle était si jolie », arrivé 3ème, mais fit ensuite une solide carrière. Une amie avec qui j’ai cohabité 9 ans me racontait son émoi de gamine alain-barriere-10831.jpgdevant les  yeux clairs et les chemises bleu ciel de ce beau chanteur brun, et lorsque vingt ans plus tard elle rencontra son futur mari, la première chose qu’elle me téléphona fut : « Il ressemble à Alain Barrière. »  Serge Lama et Patrick Fiori, candidats malheureux au concours, devinrent d’heureux vendeurs de disques durant des années… Mais il y a aussi des bizarreries, comme la participation à l’Eurovision de Patricia Kaas, alors qu’elle était déjà célèbre et n’avait rien à prouver. Et que patatras, elle se ramassa.  France : 107 points, France : one hundred and seven points, 8ème, Patricia Kaas, qu’allait-elle faire dans cette galère kitchissime ?

Depuis deux jours il fait beau. Pourvu que le concours ne ramène pas la pluie…

 

 

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4 avril 2012 3 04 /04 /avril /2012 13:22

les-fades.jpgJadis,  il y a longtemps, je reçus une invitation au Congrès de Banalyse que je déclinai en spécifiant toutefois que mon ectoplasme flotterait avec grâce entre les rails SNCF proches du Viaduc des Fades, haut-lieu de ce congrès, afin d’exprimer ma totale fraternitude avec les Banalystes.

Et voici qu’en ce 4 avril 2012, jour de la St Isidore ce qui ne saurait être un hasard, j’apprends que sort un film « Echangeriez-vous votre voiture contre deux trabant »  qui commence en 1982, date de création du Congrès de banalyse.  Il va falloir se battre pour le voir, une seule séance étant prévue au cinéma St André des Arts ce midi, à l’heure précise où j’écris ce billet, zutalors.

Si je suis élue présidente, une de mes premières mesures sera de projeter ce film dans toutes les écoles de France pour réapprendre aux enfants les vertus de l’attente, antichambre du désir, lui-même antichambre de la pulsion de vie qui manque à tant d’aigris contemporains. En attendant ce jour glorieux, je passe la parole à mon ami d’enfance et très cher érudit Pierre Bourgoin, éminent graveur de fresques de crocodiles sur les tables du lycée,  dont  voici quelques lignes de son magnifique article sur le Congrès de Banalyse.

L’homme immobile devant le temps qui passe

Rappelons les faits : un jour d'ennui, Pierre Bazantay et Yves Hélias, penseurs rennais, décident de lancer une « campagne d'observation du banal ». Ils choisissent de la tenir en juin 1982 à (sic) Fades (Puy-de-Dôme) devant la petite gare située à proximité du viaduc ferroviaire.

Les débuts de la Banalyse furent à la fois solitaires et féconds. Malgré le caractère alléchant de l'invitation qui précisait : « Les parties seront conviées, non sans le risque de l'ennui, à contempler le spectacle étrange de la platitude », aucun de ses destinataires ne déféra à l'aimable proposition. Pressentant le fait, les organisateurs avaient d'ailleurs décrété avec une pertinence rare et sage qu'étaient banalystes tous ceux qui, ayant eu connaissance de la réunion, avaient été tentés de s'y rendre. Cette absence d'arrivants leur permit de se consacrer à leurs activités  principales, être là et attendre les trains, c'est à dire et pour résumer, perdre leur temps. Ils notent avec lucidité qu'ils durent s'employer à le perdre attentivement, ne serait-ce que pour s'assurer qu'il fût bien perdu. Il y a de ces honnêtetés intellectuelles qui vous confondent d'admiration….

banalyse5.jpg… Il était prévu que les participants au Congrès de Banalyse arrivassent en train et sollicitassent du contrôleur l'arrêt aux Fades dont on a vu que la marque était d'être en pratique outrageusement facultatif. A leur intention les organisateurs avaient rédigé un indicateur horaire fort utile où l'on découvre avec intérêt qu'un Moscovite coiffé de sa chapka et muni d’un samovar de voyage devait accomplir un trajet de 59 heures et 29 minutes pour arriver aux Fades et y retrouver une charmante postière en jupe plissée de Busseau-sur-Creuse, laquelle n'avait mis que 2 heures et 32 minutes pour parvenir à destination. En théorie cela ne de­vait entamer en rien leurs chances de se retrouver car nul n'ignore le légendaire attrait qu'éprouve le Moscovite hétérosexuel pour l'aguichante Creusoise.

En 1984 se situe un épisode personnel d'importance mineure mais que je dois à la vérité de relater. Prévenu verbalement par un informateur hésitant qu'un congrès de nature indéfinissable se tenait aux Fades, je décidai de m'y rendre afin de confronter la sécheresse lacunaire de l'annonce aux impedimenta des faits… Quelques vaines déambulations le long de la voie me permirent de pren­dre conscience avec acuité d'une des questions fondamentales posées par la Ba­nalyse : que se passe-t-il lorsqu'il ne se passe rien ?

L'année 1985 fut une année fertile au regard de la Banalyse. Commen­çons-la par sa fin. En cette période une nouvelle éclata comme une bombe : « Prrai Brânické serkànf », k nemuz doslo v Praze 31. fïjna 1985 mezi 18h37'a 18h46', na konecné stanici tramvajov" ch linekc. 3, 17 a 21. »

Que ceux qu'un goût immodéré pour la pratique du hockey sur gazon a éloigné de l'étude des langues vernaculaires d'Europe centrale, sachent qu'il s’agissait là de l'annonce d'une rencontre banalytique ayant eu lieu dans un arrêt de tramway d'une banlieue de Prague le 31 octobre 1985. Cette rencontre avait pris pour modèles les congrès de Banalyse d'Auvergne. La Banalyse s'internationalisait. D'aucuns se prenaient à rêver d'une universalité en gesta­tion. D'ici peu, la Papouasie-Nouvcllc-Guinée allait devenir terre de mission.

Mais revenons quelques mois en arrière. Lors de la tenue du IV Con­grès en juin 1985, les organisateurs eurent la surprise d'apprendre que le journal local avait consacré un article conséquent à l’événement. Surprise due sans doute à une amnésie partielle imputable à l’émotion du moment puisqu’ils avaient eux-mêmes, quelques semaines auparavant, informé la presse de l'imminence de leur réunion. La Banalyse commençait sa carrière médiatique dans l’ambiguité. C’est le sort de toute révolution où la première détonation du fusil de chasse emprunté à son grand-oncle par l'émeutier affamé est confondue avec le bruit du bouchon de Champagne qui saute dans la main potelée du bourgeois prévaricateur. Il n'y a rien à faire à cela sinon tendre l'oreille et ouvrir l'œil.

Et le bon. »

banalyse 004Si ces extraits vous ont donné l’envie d’en savoir plus, l’article complet, source à la lecture d’une plénitude absolue mêlée du fou-rire que donne le sentiment d’enfin approcher l’insoutenable légèreté de l’Etre se trouve page 51 et suivantes du livre « L’Auvergne insolite  , petit Guide pataphysique », œuvre collective cornaquée par l’honorable et discret Pascal Sigoda,  et édité par lui-même au Signe de la Licorne.   Guide d’une haute tenue morale et surtout intellectuelle dont j’attends, dont nous attendons tous avec impatience le second tome prévu depuis quelques années, la Phynance seule freinant l’expression sans retenue de la spécificité pataphysique auvergnate.

Comme Vialatte, auteur illustre d’immortelles chroniques dans « la Montagne », je terminerais volontiers ce billet par sa formule « Et c’est ainsi qu’Allah est grand » si je ne craignais de faire l’objet d’un coup de filet en milieu islamique comme on dit aujourd’hui.


auvergne.jpg

 


 

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30 mars 2012 5 30 /03 /mars /2012 14:33

moustakiDepuis quelques années, Georges Moustaki ne chante plus, trahi par des poumons déficients. Chez lui, tel un sage, il peint, écrit, lit… Sur scène, jeune premier ou patriarche blanchi, il était toujours entouré de belles jeunes femmes. Chez lui, j’imagine que certaines viennent le voir et qu’il se plaît toujours à les regarder pour le plaisir des yeux  et de l’âme.

serifos moulin-copie-1J’étais allée un jour dans son appartement pour une interview. Superbe appartement,  beau sans tape-à-l’œil,  simple sans négligence. Harmonieux. Il  m’accordait vingt minutes. Nous parlâmes plus d’une heure. Il se souvenait de la lettre que je lui avais adressée, quand je souhaitais passer quelques mois en Grèce. Très gentiment, il m’avait répondu qu’il connaissait davantage Alexandrie que la Grèce et ne saurait me conseiller une île en particulier. Un ami m’a suggéré Serifos, bon choix. .. parfaitement illustré par  la chanson "l'île habitée"


 

qu’il me suffit d’écouter pour que me revienne en mémoire le parfum des hélichryses et les maisons cubiques d’un blanc étincelant, comme un divin jeu de dés.

 

album-400927.jpgJ’eus l’étourderie de lui raconter que je chantais ses chansons. « Chantez ! » demanda-t-il. A capella, devant le maître, autant dire que j’entonnai « ma liberté » avec une timidité absolue. Il eut la gentillesse de trouver que je la chantais plutôt bien, mais se demanda pourquoi j’avais choisi « ce vieux truc », que lui réclamait aussi son public. « Vos chansons illustrent des moments de vie dans lesquels chacun reconnaît une part des siens- la liberté, la solitude, l’habitude… » des chansons qui nous ressemblent et que nous retenons. »  Il précisa que la mélodie, qui fait qu’une chanson se mémorise facilement, n’était sans doute pas étrangère à cette réussite : « C’est du travail, beaucoup de travail. Les gens me croient paresseux car je suis nonchalant, mais je travaille beaucoup ».


 

 

En rentrant, j’ai imaginé un texte que lui écrirait une fan, imaginé une rencontre entre la jeune femme et le vieil homme, sensuelle et douce comme un rêve.

Le mien aurait été qu’il le mette en musique et le chante, évidemment. 

 

Elle lui avait écrit

« Cher monsieur Moustaki

Depuis bien des années

Vous accompagnez

Mes rêves

Votre voix si tranquille

M’a bercée sur une île…

Grâce à vous j’ai appris

A mordre dans la vie

Si brève

Les toits d’ardoise gris

Ondulaient sur Paris

En vagues…

Heure entre chat et loup

Où l’esprit se dissout

Divague

Il a glissé ses mains

Sous son pull et ses seins

Caresse

Ont effleuré ses doigts

A moins que ce ne soit

L’inverse

Juste un désir de peau

Sans suite, sans un mot

De trop

Son pull bleu rabattu

A caché ses seins nus

Sa peau

Il a repris ses mains

A proposé du vin

Des fruits

Ils ont bu en silence

Avant que ne s’avance

La nuit

Puis elle est repartie… 

Elle lui avait écrit

Cher Monsieur Moustaki

Depuis bien des années

Vous accompagnez

Mes rêves

Et je vous dis « Merci ».

 

 

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23 février 2012 4 23 /02 /février /2012 10:35

Après avoir écrit un bout de mon prochain livre, j'ai commencé un billetblog, que j'ai interrompu sur la constatation que cela me gonflait de commenter une fois de plus la vie, le monde, les faits d'armes d'Untel ou Autretelle en spectatrice du monde certes concernée, mais spectatrice tout de même. Alors je suis sortie, il faisait frais et beau, j'ai marché des heures dans la ville, admiré des façades magnifiques, terminé la journée en prenant un verre avec un garçon adorable, un copain de ma fille, et c'était bien. Je suis revenue en rêvant d'aventuriers au front buriné par le sel et le vent, aux yeux délavés par le ciel et la mer, d'aubes naissantes sur le port du Pirée, de couchers du soleil dans le désert Australien, du marin croisé un soir sur le port de Serifos et de toutes ces rencontre fortuites qui peuplent la mémoire...

 

 

lucky



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6 février 2012 1 06 /02 /février /2012 14:18

groult mon évasionLe 31 janvier dernier, vous eûtes 92 ans. D’aucuns vous croient presque immortelle mais ce n’est pas mon genre, excepté si vous étiez Académicienne. Alors comme je déteste les hommages posthumes où « les morts sont tous de braves types » disait Brassens (les femmes aussi sûrement…) j’ai envie, avec pour prétexte votre récent anniversaire, de vous remercier dès aujourd’hui pour tout ce que vous m’avez donné.

Sans doute vous trouvé-je géniale en raison d’affinités de pensée, il est rare que l’on admire des personnes qui pensent rigoureusement aux antipodes de vos convictions, mais pas que… Si je suis effectivement féministe, amoureuse de la vie et des hommes et révoltée par les discriminations quelles qu’elles soient, ce n’est pas sans mélancolie parfois, comme une sorte de découragement. Et là, c’est bien grâce à vous que j’ai su garder la petite flamme qui toujours éclaire l’obscurité et les obscurantismes.

Quand je me sens découragée, relire la diatribe de George contre Gauvain qui répète « C’est comme ça  » pour excuser sa résignation (in « les Vaisseaux du cœur »), me requinque illico, et me permet d’engueuler copieusement mes Gauvain à moi, ni pêcheurs ni Bretons, mais parfois bien défaitistes…

groult vaisseauxAh ! « Les Vaisseaux du cœur »… L’ai-je lu huit fois, dix fois ? Impossible à dire, je le connais presque par cœur. J’aime me blottir dans mon gros coussin rose et en relire quelques pages correspondant à mon humeur du moment, j’aime retrouver dans vos descriptions quelques uns de mes souvenirs : « Quand la vie tient ainsi tout entière dans l'instant et qu'on parvient à oublier tout le reste, on atteint peut-être la plus intense forme de joie. »  On croit que le désir est infiniment personnel, que nulle autre que soi n’a ressenti une telle intensité, et c’est pourtant avec une jubilation sans pareille que j’ai lu vos pages sur le désir dans lesquels je reconnaissais certains des miens. Les Vaisseaux du cœur me servent aussi d’étalon-mesure : un homme qui n’aime pas ce livre aura du mal à me séduire.

groult touche étoileAujourd’hui où j’ai de plus en plus conscience qu’il me reste à vivre moins que ce que j’ai déjà vécu, je suis émerveillée par votre description si honnête de l’âge. Vous n’êtes pas du genre à vous bercer d’illusions sous prétexte que les gens vous trouvent toujours dynamique, pas plus que je ne crois ceux qui prétendent que je ne matriochka3change pas. Si, on change, mais comme vous l’écrivez, subsistent en nous l’enfant, la jeune fille, la jeune femme et la femme mûre…  « L'âge est un secret bien gardé. Dire ce qu'est la vieillesse, c'est chercher à décrire la neige à des gens qui vivent sous les Tropiques. » (La touche étoile) Peu de personnes ont le courage de le dire.

Je suis féministe et le resterai toujours. Il suffit de voir la fureur de certains hommes pourtant éduqués lorsque je leur lis des extraits de votre livre : « Cette mâle assurance » recueil de perles machistes énoncées par d’éminents poètes, scientifiques, philosophes, journalistes… à travers les siècles, pour comprendre combien nous sommes loin d’être sorties de l’auberge phallocratique. Ils sont en fureur non pas contre leurs semblables, mais contre moi, qu’ils soupçonnent d’être « en guerre contre les hommes ». Guerre, ô que groult ainsi soitellenon ! Là encore, Benoîte, vous avez fait beaucoup en montrant qu’on peut être viscéralement féministe et aimer tout aussi viscéralement les hommes. Qu’on peut s’indigner à raison : Il y a tout de même une distorsion incroyable des valeurs à voir des députés ou les forcenés de "Laissez-les vivre" nous présenter des embryons qui n'ont guère plus de conscience qu'une larve d'insecte, alors qu'on discute très abstraitement dans les instances internationales de la faim dans le monde, sans que personne ose poser sur la tribune un vrai enfant en train de mourir de malnutrition. Le seul contenu de nos poubelles ressusciterait le Sahel. (Ainsi soit-elle)

100_PANA685.jpgEt parler avec une tendresse infinie de l’homme aimé. Vous m’aviez reçue chez vous pour une interview sur « mai 68/ mai 2008 », juste avant de rejoindre à vélo l’éditeur qui vous conviait à déjeuner. Pédaler dans Paris à 88 ans, je rêve d’être capable de le faire !  Vous m’aviez raconté avec allégresse que vous vous apprêtiez à partir à la pêche à pied en Irlande (« en Bretagne, il n’y a plus rien à récolter ! ») avec une de vos filles, puis aviez enchaîné sur la merveilleuse complémentarité que vous aviez avec Paul Guimard : « Il aimait la voile, moi pas, j’aimais la pêche, lui pas. On partait donc ensemble en bateau, il naviguait, et je pêchais… »  D’autres auraient vécu cette complémentarité comme une opposition insoluble…

Ce jour là vous m’avez donné la plus belle définition de l’amour, que j’ai mise en exergue du « Guide des amours plurielles » : « Aimer, c’est partager tout ce qu’on peut et souhaite partager avec l’autre. Et pour le reste, mener sa vie comme on l‘entend. Seul cet amour est durable. » Vous m’aviez demandé depuis quand j’étais en couple, puis murmuré : « Continuez, vous verrez, avec les années, c’est de mieux en mieux… » Vous aviez raison, à l’opposé de tous les préjugés sur la routine inhérente à la vie commune. Nous avions parlé de la routine, que l’amour transforme en délicieux rituels et le désamour en ennui… Ennui qu’il faut aussi se garder de diaboliser, comme le veut l’époque, à laquelle vous résistez avec humour :

miroir.jpg-Aujourd'hui, mon chéri, on s'ennuie de quatre à six.

 -Encore? On s'est déjà ennuyés hier...

 -C'est bon pour l'imagination. On devient idiot si on ne sait pas s'ennuyer.

(La touche étoile)

Humour et féminisme, ce n’est pas si fréquent, je me suis souvent heurtée à des féministes pures et dures traitant « d’asservie du phallus » celles qui persistent à aimer l’autre sexe.

Mais votre plus beau cadeau, c’est votre amour de vous, qui m’a sûrement aidée à cultiver l’amour et la confiance en moi sans  culpabiliser. A une femme jalouse qui me reprochait d’être trop sûre de moi (étrange reproche…) j’aurais volontiers répliqué:

Eh bien oui, je suis égoïste. Et alors? Il me semble au contraire qu'en m'aimant moi-même je suis devenue plus généreuse avec les autres. Les perpétuels déprimés, voilà les vrais égoïstes. Rien de plus exigeant, de plus narcissique et égocentrique qu'un déprimé chronique! (Mon évasion)

Pour cette joie de vivre contagieuse, Benoîte, merci.


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28 octobre 2011 5 28 /10 /octobre /2011 17:19

 

Olivier Nakache et Eric Toledano  ont fait leurs premières armes de réalisateurs au festival du court métrage d’humour de Meudon.  Du coup, ils ont promis de toujours présenter leurs films en avant-première dans cette ville. Ce sont des mecs reconnaissants, à qui le succès n’a pas donné le melon. Simples, sympas, humains (pourvu que ça dure).

affiche intouchablesLeurs précédents  long-métrages  étaient de jolies comédies sensibles et bien scénarisées. Le dernier « Intouchables », crève le plafond avec une histoire improbable bien que vraie : l’amitié nouée entre un aristocrate tétraplégique (dans la vraie vie, c’est le comte Philippe Pozzo di Borgo, grosse, grosse famille…) et un loubard de banlieue (dans la vraie vie, c’était un Beur, dans le film c’est un africain interprétée ô combien magistralement par Omar Sy).  Choc des cultures, de la santé insolente de l’un face à l’infirmité de l’autre, de la richesse insolente de ce dernier face aux galères à répétition du loubard. Sujet casse gueule s’il en est,  avec risque de manichéisme genre  les Groseille et les Le Quesnoy dans «  la vie est un long fleuve tranquille », ou moralisateur politiquement correct, prenant le parti du loubard contre le riche ou celui de l’aristocrate bien élevé contre la vulgarité du d’jeun de cité.  Risque de forcer sur la corde comique et de devenir irréaliste car  c’est une comédie, mais pas que… Risque de devenir compassionnel et ennuyeux.  

fume filmRien de tout cela ! « Intouchables » est d’une vérité qu’on n’atteint que lorsqu’on est assez sensible pour ne pas prendre parti, juste observer les gens avec intérêt et amour. Toutes les répliques font mouche car elles sont d’une justesse exceptionnelle. Du coup, comme dans la vraie vie, on rit, on s’émeut,  et on s’agace aussi devant ces photo fauteuil coursedeux personnages capables, malgré leurs différences, voire leur opposition, d’être aussi touchants et insupportables l’un que l’autre. Ajoutons à cela  des personnages secondaires remarquables et un traitement de l’image et du son qui prouvent une totale maîtrise technique et artistique.  Le tandem Toledano/Nakache a atteint une maturité stupéfiante en dix ans.

Un acteur est né, tous les medias vont en parler : Omar Sy dont l’exubérance  et le sourire ravageur  sont entièrement au service d’un jeu sensible, vif et drôle mais sans rien de trop. Superbe performance.

regards filmQuant à François Cluzet, respect : cloué sur un fauteuil bras et jambes inertes, il arrive à exprimer toute la gamme des sentiments-  mélancolie, arrogance, colère, joie, amusement, agacement- juste avec son regard qui frise ou s’embrume et une voix qu’il a dû travailler quelques tons plus bas que la sienne pour qu’elle soit celle d’un véritable tétraplégique (eh oui, faute de pouvoir respirer à fond, la paralysie totale change la voix). Franchement, ça mériterait un Prix d’interprétation  aux Césars ou à Cannes.

Bon, en gros, j’ai adoré ce film, en salles le 2 novembre. Courez-y, il est tonique  et ça fait du bien par les temps actuels!

 

 

 

 

 

 

 

 

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7 juillet 2011 4 07 /07 /juillet /2011 15:52

pied bébéL’été est la saison où tout se dénude, et d’abord le pied. Ce ne sont que tongs, sandales, pieds nus, spartiates… qui montrent que, définitivement, le pied, s’il n’est pas toujours bot ni bête, est souvent laid. Hormis les bébés dont l’alignement des orteils, vu par en dessous, évoque irrésistiblement des petits pois dans leur cosse, hormis  quelques stars qui passent leur temps de pédicure en massage réflexologique et cajolent leur pieds dans des pompes coûtant plusieurs SMIC, la majorité de nos contemporains et contemporaines arborent des petons plus que patauds. Sincèrement, je ne comprends pas le fétichisme du pied et ce malheureux Georges Tron (qui, par parenthèse, doit en vouloir à mort à DSK, car sans lui jamais ses collaboratrices n’auraient porté plainte, et au final, DSK sera peut-être blanchi et Tron condamné !)  qui trouve son pied dans les pieds des autres, et son plaisir à les caresser entre les deux gros orteils…

hallux valgue2Le jeu du pied, que j’ai inauguré avec un ami sur un ferry grec rebaptisé aussitôt « Ferry-Botte » consiste à observer les pieds des passant(e)s dans  une foule : plage, passerelle de ferry, file d’attente. Chaque joueur choisit un modèle de prédilection : le pied dont les orteils, poussiéreux, secs et ronds, évoquent des têtes de tortues (les miens après une journée de marche dans le sable brûlant) les pieds grecs au 2ème orteil plus long, les pieds à Hallux valgus, gros orteil formant une bosse extérieure, les pieds osseux, etc… La suite est simple : chaque fois qu’un joueur aperçoit un pied de la catégorie choisie, il annonce 15, puis 30, 40 et jeu, comme au tennis. La partie se joue en trois, quatre ou cinq sets.  

pied en griffeAutre jeu : collectionner les photos de pieds à l’insu de leur propriétaire, et se faire le soir des projections. Plus complexe : arriver à photographier discrètement les pieds d’une part, le visage de l’autre. But du jeu : lors de la projection, chaque joueur projette ses clichés en désordre et les autres doivent deviner à quel visage appartient tel ou tel pied. Très amusant, car il n’est pas rare qu’une charmante jeune fille arbore des pieds déformés, ou qu’un maigrelet ait des petons de sumo.

Dernier jeu : se faire mutuellement des massages du pied. Jusqu’ici, c’était du bien-être, quasi paramédical, aujourd’hui ça devient subversif, c’est encore meilleur J

Décidément, les vacances, c’est le pied !

 amoureux.jpg

 

Et pour le prendre, voici que paraît aujourd'hui une compilation de trois de mes romans en un seul volume à petit prix.  

COUV-Fran-oise-Simp-re.jpg

Ce qui va me permettre de délaisser un peu ce blog, vous aurez de quoi lire :) 

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4 juillet 2011 1 04 /07 /juillet /2011 16:57

 _nergie.jpg La semaine dernière, j’ai fait une cure de « vraie vie »,

loin du téléphone, de la TV et d’Internet. Pour vérifier que rien ne justifie d’être connecté en permanence. L'habitude de l’être rend machinal le fait d’aller trois fois par jour consulter ses mails, voir si quelqu’un a posté un truc drôle ou intéressant sur FB, ou  surfer sur un site… par désœuvrement ou difficulté devant la page blanche. Autrefois on taillait cent fois ses crayons quand l’inspiration manquait…  

Loin des écrans, j’ai eu le sentiment de disposer d’un monde à la fois plus vaste et plus calme, de retrouver des sensations variées, loin des infos en boucle qu’il suffit d’écouter une fois le matin et une autre le soir pour savoir l’essentiel. Ca ressource, ça requinque, ça libère… Ca donne aussi du temps pour de belles découvertes. Des quartiers méconnus, des gens heureux sous le soleil, de jolies boutiques, quelques expos et la nouvelle bouquinerie Oxfam qui fêtait son inauguration jeudi dernier. 

Facade-editee.2.jpgLe principe est simple : Oxfam- ONG de commerce équitable et de développement solidaire- récolte des livres, CD et DVD en bon état auprès de donateurs privés ou institutionnels, et les vend à des prix défiant toute concurrence dans une boutique sympa tenue par des bénévoles. Le bénéfice tiré de cette activité finance les projets d’action et de développement soutenus par interieur2.jpgl’association. La première Bouquinerie a ouvert l’an dernier rue Delambre dans le 14ème, il y en a une autre à Lille et la petite dernière se trouve 8 rue St Ambroise dans le 11ème. On y rencontre des gens chaleureux, motivés et j’y ai déniché un des premiers romans de Marc Cholodenko, quasi introuvable, whaouh !  

On se prend à rêver que ces livres à bas prix permettent à des gens démunis de découvrir le plaisir de la chose écrite et partant, de se sentir moins seuls. La vérité oblige à dire que dans le 14ème, quartier bobo/branché, les habitués sont plutôt des boulimiques de lecture ravis de satisfaire leur passion pour 1 à 10 €. On verra qui vient dans le 11ème, mais d’ores et déjà ce recyclage me ravit. Comme l’initiative d’un libraire à Brisbane, en Australie, qui vendait 5 dollars des livres du monde entier, sans doute laissés sur place par des touristes pour alléger leurs bagages. Si on lui rapportait le bouquin le lendemain, il le reprenait 3 € et le remettait en vente. Tout le monde y trouvait son compte.  .     

Il est difficile de partager en dix une baguette et une tranche de jambon, ça laisse tout le monde sur sa faim, alors que partager un roman, une musique, un spectacle, une exposition… n’enlève rien à celui ou celle qui partage, au contraire.

canal.jpg 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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6 avril 2011 3 06 /04 /avril /2011 17:21

Il fait beau et chaud (contrepèterie Belge) et c’est bon ! 

frankensteinA  propos de Belge, je suis allée voir au Lucernaire une pièce du Belge Thierry Debroux, jouée par deux acteurs suisses : « Mademoiselle Frankenstein ».  (du mardi au samedi à 19h jusqu'au 23 avril) La demoiselle, c'est Marie Shelley, auteur à 19 ans du roman « Frankenstein ». Comment une si jeune femme a-t-elle pu inventer un tel monstre? De cette question posée par son interlocuteur, un certain Lazzaro Spallanzani inquiétant et ambigu à souhait, s'ensuit un face-à-face entre les deux personnages où la tension monte, jusqu'au final fort en émotion. 

Mary Shelley n’avait que 19 ans, mais au XIXe siècle, cet âge suffisait pour avoir un passé parfois douloureux, capable d’engendrer des monstres intimes. La jeune femme résiste à l’interrogatoire de Lazzaro dont on comprend vite qu’il est le portier de son inconscient, l’homme qui va lui permettre de révéler ce qui la hante. Ce faisant, le texte évoque l’Homme dépassé par les énergies et les innovations scientifiques qu'il ne maîtrise pas, question ô combien actuelle en ces périodes de fuites nucléaires et d’embryons à tout prix et parfois hors de prix. Le coup de théâtre survient quand à son frankenstein2tour Mary Shelley pousse Lazzaro dans ses retranchements et l’oblige à révéler qui il est. Le texte prend alors une portée universelle: comment devient-on ce qu'on est? Pourquoi certains êtres semblent-ils des monstres, et en sont-ils vraiment? Question à méditer par le président, si prompt à qualifier les criminels de monstres, sans s’interroger sur leur itinéraire, qui aurait pu être tout différent si quelqu’un leur avait prêté attention à temps. 

L'interprétation de Aline Gampert (Mary Shelley) et Frédéric Landenberg (Lazzaro Spallanzani), dans un décor sobre mais troublant, est d'une justesse impressionnante. On en oublie qu’ils sont comédiens, on est tenu en haleine, et on sort de là impressionné tant par le texte que par la performance.

Après le spectacle, prendre un verre en terrasse au mois d’avril sans avoir froid, en discutant avec des passionnés de littérature et de théâtre, fait partie des bonheurs qui donnent du prix à l’existence. Laurent Terzieff, dont je reste fan absolue, avait fait du Lucernaire son domaine. Il y règne toujours l’esprit de passion, de modestie et de courtoisie qui le caractérisait.

 fleur2.jpg

 

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