Dimanche: vu R… un monsieur d’environ 84 ans qui s’occupe des Eclaireurs de France depuis qu’il en a 24. Il avoue que c’est de plus en plus dur : « On nous impose des normes stupides qui rendent impossibles certaines activités. Dernière absurdité : un grifouilleur du ministère s’est avisé que durant les camps, nous faisons sécher la vaisselle au soleil. Il a décrété qu’avec la pollution qui tombe du ciel, c’était dangereux et qu’il fallait donc essuyer la vaisselle et la ranger dans une cantine métallique fermée. Sauf qu’un torchon, vite humide, laisse un bouillon de culture sur les assiettes et que ce bouillon s’épanouit à merveille en été dans une cantine fermée ! On l’a fait remarquer au Ministère. La circulaire n’a pas été abrogée mais nous ne devrions pas être trop contrôlés.»
Lundi : croisé dans la rue un « pédibus ». Késaco ? Une trouvaille étonnante. Autrefois, les parents accompagnaient leurs enfants- et parfois ceux des voisins- à pied à l’école, sans rien demander à personne. Il arrivait même que les enfants aillent tous seuls à l'école, stupéfiant, non? Aujourd’hui, il faut organiser des pedibus : un parent en tête de cortège, derrière lui quelques enfants en rang, et un autre parent pour fermer la marche et surveiller les gamins… L’idée même qu’il faille créer un « pédibus » pour marcher en ville est rigolote… mais où j’ai explosé de rire, c’est en m’apercevant que le parent de tête et le parent de queue avaient revêtu un gilet jaune fluo ! Après enquête, il paraît que c’est la règle pour un pedibus, comme quoi l’infantilisation n’a pas de limite …
Mercredi, blague d’actualité : "Raymond Domenech a été contacté par le Pôle Emploi. On lui propose un poste de « professeur d’échecs »." Le soir, on annonce au JT que NS a bouleversé son agenda pour recevoir Thierry Henry et qu’il va proposer un « plan Marshall » pour le football.
Quand on sait que le vrai plan Marschall concernait la reconstruction de la France en 1945 après six ans de guerre, on se dit que le ridicule ne tue pas les politiques (ni les journalistes) ce qui est regrettable. Surtout qu’après l’homélie de Roselyne « Je leur ai dit de tout donner et j’ai vu les larmes dans leurs yeux », ça en ferait deux d’un coup. Pauvre Roselyne : entre la grippe H1N1 et la coupe du monde de foot, 2010 sera son « annus horribilis… »
Jeudi : manif, j’en ai encore les pieds en compote. Plus de quatre heures pour aller de République à Nation. Foule dense. Avec des gens du privé comme du public, des jeunes comme des vieux. Et le sentiment que le ressentiment dépasse la question des retraites. Ressentiment à l’idée que certains en bavent quand d’autres se gavent. Qu’après des décennies de progrès, on régresse. Depuis l’Antiquité, on est passé de l’esclavage au travail payé, des 60h par semaine, aux 50h, 45h, puis 40, 39, 35h, tout en produisant de plus en plus de richesses : + 30% ces vingt dernières années en France. Le progrès social, c’était offrir à ceux qui produisaient ces richesses plus de temps… libre. L’argument « on vit plus longtemps, faut travailler plus longtemps » suggère que le travail rémunéré est toute la vie et le reste- amour, famille, loisirs, voyages, culture, vie sociale et associative- une part négligeable de l’existence.
Or, quand on voit combien la majorité des retraités sont occupés, on se demande comment ils ont trouvé le temps de bosser autrefois ! Réponse simple : en sacrifiant des parts essentielles de leur vie, peut-être les meilleures. Il y a quelques années, un ami de 62 ans m’a avoué n’avoir su aimer qu’à deux périodes de sa vie : quand il était étudiant et pensait prioritairement à ses amours, et à la retraite quand il a eu le temps. « Entre les deux, dit-il, j’ai tellement bossé que j’ai rendu deux femmes malheureuses- deux divorces- et pas vu grandir mes enfants. Aujourd’hui, je prends enfin le temps d’aimer la troisième!
Le travail nuit à la santé et à l’amour, qu’on se le dise !