... Secrètes car je m'y livre quand je suis seule chez moi... sans aucune honte, d'ailleurs, plutôt une intense jubilation.
Donc, ces jours là, je surfe sur des sites riches en perles vintage, que devraient m'interdire mon QI et mon évidente modernité. (par exemple mes penchants geekette qui m'ont fait adopter Linux. Pas Linus, le petit garçon à couverture de chez Snoopy, Linux, avec un X... comme film X)
Ainsi ai-je redécouvert que si le succès du gangnam style, visionné des millions de fois et parodié des milliers peut surprendre, il n'y a pas de quoi crier à la décadence de la civilisation ou alors celle-ci a commencé il y a longtemps. En 1962, la chanson d'un sympathique chauffeur de taxi nommé Pierre Perrin resta en tête du hit-parade durant neuf semaines. Il s'agissait du Clair de lune à Maubeuge, succès si improbable qu'il donna lieu à un film éponyme sur Perrin, dont ce fut le seul succès.
Pierre Perrin est mort à 60 ans en 1985, totalement oublié. A tel point que certains attribuent aujourd'hui cette chanson à Bourvil voire à … Claude François, qui se contenta de la chanter dans une version twist réjouissante de ringarditude.
Parmi mes perversions inavouables quoique déjà avouées, il y a le concours Eurovision de la chanson, dont le charme qu'il exerce sur moi s'explique aisément. Il me suffit d'entendre le commentaire ampoulé du commentateur et les envolées lyriques de l'orchestre ( sur un texte de Françoise Dorin, excusez du peu) pour me retrouver presque 50 ans en arrière, pelotonnée sur le canapé du salon, en compagnie de mes parents non seulement vivants mais dans la force de l'âge.
Ecouter ces chansons, c'est retrouver instantanément- et physiquement- le bien-être d'alors, le goût d'éternité et de tendresse d'une époque qui me semble parfois appartenir à une vie antérieure tant les protagonistes qui peuplaient mon enfance- y compris des copains de classe- sont aujourd'hui plus nombreux dans l'au-delà que dans l'eau d'ici.
Il y a bien des années, dans une vie antérieure, je me souviens d'une grand-mère qui m'achetait le jeudi des Paille d'Or et le Journal de Mickey, d'un grand-père sortant solennellement de son gousset les "cent francs du dimanche", devenus un franc en 1959 ou 1960, d'une petite fille aux yeux amande qui me ressemble.
Dans ma vie antérieure, Jean, tu vivais et riais. J'ai parfaitement en mémoire l'éclat de tes yeux si noirs, ton sourire et ta voix. L'épaisseur de ton cou, comme un cou de taureau, qui te faisait paraître si solide. Tu es mort et pourtant toujours si vivant, si présent dans ma vie d'aujourd'hui. Décidément, la mort n'est jamais vraiment où on l'attend...
Benoîte Groult a raison : les strates de notre vie ne s'effacent jamais. A l'intérieur du corps qui change demeurent, intactes, la petite fille, l'adolescente et la jeune femme que l'on fût. Avec les mêmes émotions et sensations, que font renaître ces ringardises que j'exhume.
Pour clore sur une note joyeuse, j'ai déniché une chanson en franco-allemand adaptée à ce jour où l'on s'interroge sur l'avenir du couple France/Allemagne (pas en sport, en politique) et qui aurait été encore plus adéquate si Angela Merkel n'avait pas gagné. Le décalage entre le son et l'image fait de cette chanson sentimentic et romantale un hilarant joyau.